MADEMOISELLE, L' honneur que j'ai de presenter à VOTRE ALTESSE SERENISSIME ce nouveau Traité de la Chorégraphie, est un hommage naturellement dû à la protection que Vous accordez aux beaux Arts, & à la perfection que vous ajoutez à celui dont je fais profession. En effet on est saisi de respect & de joie en voyant V. A. S. exprimer avec tant de justesse & de facilité les differens caracteres des Danses qu'Elle veut executer. Les Graces Page semblent marcher sur vos pas; & l'air noble & majestueux qui en accompagne tous les mouvemens ne cause pas moins d'admiration que de plaisir. Si vos simples amusemens, MADEMOISELLE, inspirent une si haute estime, quelle idée ne doit-on point avoir de l’élevation des sentimens de V. A. S. les Esprits les plus sublimes sont seuls dignes de nous en faire sentir le prix. Trop heureux, MADEMOISELLE, si vous daignez approuver mon Ouvrage, dont le plus noble employ sera de tracer exactement les Danses qui lui auront été les plus agréables, & peut-être de transmettre à la Posterité les Compositions qu'il plaira à V. A. S. de nous donner. C'est l'ambition de celui qui sera toute sa vie avec un très-profond respect,
MADEMOISELLE,
DE VOTRE ALTESSE SERENISSIME
Le très-humble & très-obeissant
serviteur RAMEAU.
APRE'S avoir travaillé de tout mon possible à faire connoître l'utilité de la Danse, tant en elle-même que par rapport aux regles necessaires dans la vie civile; ce qui se voit dans mon Livre du Maître à Danser. J'ai pensé qu'il ne suffisoit pas d'avoir montré à prendre des mouvemens justes, & à faire tous les Pas selon les regles de l'Art; j'ai cru devoir y joindre ce Traité de Chorégraphie pour en faciliter l'étude & en abreger le tems. C'est même une reconnoissance que je dois au Public de l'accueil favorable qu'il a fait à mon premier Ouvrage. Il y a bien des personnes, qui après avoir sçu toutes les Danses, en perdent les idées, parce qu'elles en ont interrompu la pratique; ce Traité leur Page rappellera tout ce qu'elles commençoient à oublier, & sans avoir la peine de faire venir de nouveaux Maîtres, elles pourront d'elles-mêmes se remettre dans toute la mesure des Pas, & dans toute la justesse des mouvemens. Ce qui leur sera sans doute une récreation très-agréable. Je dis plus, Messieurs les Maîtres à Danser n'en dédaigneront pas l’usage pour euxmêmes, je me flate qu'ils y trouveront une route sûre pour la regularité des Danses, & en même tems si facile, qu'il ne faut pas y revenir plus de dix fois pour en avoir une parfaite intelli-gence. Ceux qui sçavent l'ancienne méthode voudront bien comparer le parallele que j'en ai fait avec la nouvelle, je m'assure qu'ils demeureront d'accord que mes Additions sont justes, & qu'il n'y a aucun Pas que je n'aye regulierement marqué.
J'Ai examiné par ordre de Monseigneur le Garde des Sceaux une Augmentation à l'ancienne Table de la Choregraphie, qui m'a paru très-utile aprés me l'être fait expliquer par celui qui en est l'Auteur: j'ai cru que ceux qui depuis longtems se servoient de cette maniere y trouveront cette Augmentation trés juste pour l'intelligence & la facilité d'écrire les Pas de Danse qui sont dans l'ancienne Table avec plus de correction, Fait à Paris le vingt Octobre mil sept cens vingtcinq.
PECOURT.
LOUIS par la grace de Dieu Roy de France & de Navarre : A nos amez & feaux Conseillers, les gens tenans nos Cours de Parlement, Maîtres des Requêtes ordinaires de notre Hôtel, Grand Conseil, Prevôt de Paris, Baillifs, Sénéchaux, leurs Lieutenans Civils, & autres nos Justiciers qu'il appartiendra, Salut. Notre bien amé le Sieur RAMEAU, Maître à Danser ordinaire de la Maison de notre très-chere & très-amée Sœur MADAME REINE D'ESPAGNE Nous aïant fait remontrer qu'il se seroit appliqué depuis plusieurs années à dresser & composer des Ouvrages pour la perfection de la Danse, qu'il a ci-devant donnez, & qu'il donnera par la suite, dessinez & gravez par lui-même, de sa composition & invention, qui ont eu tout le succés qu'on en pouvoit attendre; & que desirant Page graver ou faire graver, & faire imprimer une Methode nouvelle pour apprendre à écrire, ou tracer toutes sortes de Danses sur le papier, & même qui donne l'intelligence de faire tous les Pas selon les Regles. Asin de la rendre publique dans toute sa perfection, il auroit besoin pour cet effet de nos Lettres de Privilege, qu'il Nous a trés-humblement supplié de lui accorder, offant pour cet effet de la graver, faire graver & faire imprimer en bon papier & en beaux caracteres, suivant la feüille imprimée, & attachée pour modele sous le contrescel des Présentes. A ces causes, voulant traiter favorablement ledit Sieur Exposant, & lui donner des marques de la distinction que merite son travail & ses talens, Nous lui avons permis & permettons par ces Présentes de faire imprimer & graver par tels Graveurs, Imprimeurs & Libraires qu'il voudra choisir ladite Methode nouvelle pour apprendre à écrire ou tracer toutes sortes de Danses sur le papier, & même qui donne l'intelligence de faire tous les Pas selon les regles, en un ou plusieurs volumes, conjointement ou séparément & autant de fois que bon lui semblera, sur bon papier & caracteres conformes à ladite feüille imprimée & attachée pour modele sous le contrescel desdites présentes, & de la vendre, faire vendre & débiter par tout notre Royaume pendant le tems de huit années consecutives, à compter du jour de la date desdites Présentes. Faisons défenses à toutes sortes de personnes de quelque qualité & condition qu'elles soient d'en introduire d'impression ou gravure étrangere, dans aucun lieu de notre obéissance. Comme aussi à tous Graveurs, Imprimeurs, Libraires, Marchands en Tailles-douces Page & autres de copier, faire copier, imprimer, faire imprimer, ou graver, écrire ou faire écrire, vendre, faire vendre, debiter ni contrefaire ladite Methode nouvelle ci-dessus expliquée, en tout ni en partie, ni d'en faire aucun extrait sous quelque pretexte que ce soit, d'augmentation, correction, changement de titres, même en feuilles séparées ou autrement, sans la permission expresse & par écrit dudit sieur Exposant, ou de ceux qui auront droit de lui; à peine de confiscation des exemplaires, pieces , desseins, écrits, gravée ou contrefaite, & des ustanciles qui auront servi à ladite contrefaçon, que Nous entendons être saisis en quelque lieu qu'ils soient trouvez, & de six mille livres d'amende contre chacun des contrevenans, dont un tiers à Nous, un tiers à l'Hôtel-Dieu de Paris, & l'autre tiers audit Sr Exposant, & de tous dépens, dommages & interêts. A la charge que ces Présentes seront enregistrées tout au long sur le Registre de la Communauté des Libraires & Imprimeurs de Paris, & ce dans trois mois de la date d'icelles; que la gravure & impression de ladite Methode nouvelle sera faite dans notre Royaume & non ailleurs, & que l'Impetrant se conformera en tout aux Reglemens de la Librairie; & notamment à celui du dixiéme Avril dernier; & qu’avant que de l’exposer en vente le manuscrit gravé ou imprimé sera remis dans le même état où l’Approbation y aura été donnée ès mains de notre trés-cher & feal Chevalier Garde des Sceaux de France, le Sieur Fleuriau d'Armenonville, Commandeur de nos Ordres; & qu'il en sera ensuite remis deux Exemplaires dans notre Bibliotheque publique, dans celle de notre Château du Louvre, & un Page dans celle de notredit trés-cher & feal Chevalier Garde des Sceaux de France le Sieur Fleuriau d'Armenonville, Commandeur de nos Ordres, le tout à peine de nullité des Présentes. Du contenu desquelles vous mandons & enjoignons de faire joüir l'Exposant ou ses ayans cause, pleinement & paisiblement, sans souffrir qu'il leur soit fait aucun trouble ou empêchement. Voulons qu'à la copie desdites Présentes qui sera imprimée tout au long au commencement ou à la fin dudit Livre, foy soit ajoûtée comme à l'original. Commandons au premier notre Huissier ou Sergent, de faire pour l'execution d'icelles tous actes requis & nécessaires, sans demander autre permission, & nonobstant clameur de Haro, Charte Normande, & Lettres à ce contraires; car tel est notre plaisir. DONNE' à Paris le huitiéme jour de Novembre l'an de grace mil sept cens vingtcinq, & de notre regne le onziéme. Par le Roy en son Conseil.
CARPOT.
Registré sur le Registre VI. de la Chambre Royale & Syndicale de la Librairie & Imprimerie de Paris, n. 225. fol. 261. conformement au Reglement de 1723. qui fait défenses art. IV. à toutes personnes de quelque qualité qu'elles soient autres que les Libraires & Imprimeurs de vendre, debiter & faire afficher aucuns Livres pour les vendre en leurs noms, soit qu'ils s'en disent les Auteurs ou autrement; & à la charge de fournir les Exemplaires prescrits par l'Art. CVIII. du même Reglement. A Paris le 4. Decembre 1725.
Signé BRUNET, Sindic.
COMME ce petit Traité n'est qu’un Abregé de la Choregraphie, & qu’il ne contient qu’un nombre de Pas qui se pratiquent dans les Danses de Ville; j'ai cherché les 2 temperamens les plus faciles, pour que l'on puisse les connoître sans beaucoup de peine.
Je commence par exposer trois principes géneraux: sçavoir, la connoissance du terrain; l'usage que l'on doit faire des differentes lignes de la Geometrie; & aussi du signe qui exprime la presence du corps.
J’entends par le terrain, de supposer que chaque planche que l'on regarde, represente une Salle ou le Parquet, sur lesquels sont tracez les pas & les figures que l'on doit observer. Suivant cette disposition, le haut de la salle est le haut de la feüille où se pose la musique, & dont la partie ne doit pas contenir plus de mesures qu'il y a de pas tracez sur les differentes lignes.
Les deux côtez: l'un est le droit, & l'autre le gauche.
Le bas de la feüille, represente le bas de la salle où l’on se place pour commencer.
3 Dans le vuide de ce terrain, on trace differentes figures, telles que les danses les demandent.
Ces figures differentes se forment par le secours des lignes geometriques, qui conduisent d'un endroit à l'autre; & par conséquent traçant un chemin sûr, font danser régulierement.
La ligne droite conduit du bas de la salle vers le haut; mais si l’on doit revenir en arriere, & conséquemment sur le même chemin; pour lors on se sert de la ligne ponctuée qui communique à l'autre, & fait connoître que l’on revient sur ses pas: ce qui se pratique également aux autres lignes, lorsqu'il en est besoin.
Pour exprimer la presence du corps, c'est un demi-cercle renversé & tranché d’une ligne au-dessus; avec cette distinction, que la ligne qui tranche est la presence du corps, & la partie ronde le dos; les deux côtez, l'un est le droit, & l’autre le gauche, ainsi qu’il est écrit.
4 La presence du corps de la femme, est marqué d'une double barre 2, pour la distinguer d'avec l'homme.
Et pour donner une démonstration plus sensible, j'ai mis quatre personnes dos à dos no. 3; & le 4 represente quatre personnes l'une devant l'autre.
Ces trois principes me paroissant assez sensibles, pour ne s'y pas méprendre, je passe au Chapitre suivant, qui traite des Positions & de la forme de hierogliphes, qui démontrent les Pas.
LEs Positions ne sont inventées que pour donner aux pas une proportion mesurée, soit en avant, soit en arriere, ou de côté, & croisé par devant ou par derriere; ce qui contient le corps dans une situation avantageuse pour le conserver dans son aplomb, & donner aux jambes la facilité de former les pas avec plus de regularité.
La demie Postion qui est dans le premier quarré, est nommée demie, parce qu'elle ne represente qu’un pied, qui est le gauche, étant elle-même posée du côté gauche de la ligne.
Sa tête a la forme d’un O: le talon11. Définition du pied - прим. автора est 1. le commencement de la queuë sortant de l'O: 2. est le cou du pied; le bout 3. represente la pointe du pied.
6 Le deuxiéme, est la demie position du pied droit, mis par la méme raison du côté droit de la ligue.
Le troisiéme, est une position entiere, qui est la premiere, les deux talons près l'un de l'autre, & les deuх pointes en dehors.
Le quatriéme, est la deuxiéme position, les deux pieds écartez l'un de l'autre, distant de la longueur du pied & sur une même ligne.
Le cinquiéme, est la troisiéme position, qui est d'avoir les deux pieds l'un devant l'autre, mais pas plus croisé que le talon du pied de devant, au droit du cou du pied de celui qui est derriere, & l'un près de l'autre.
Le sixiéme, est la quatriéme position, qui est d'avoir les pieds l'un devant l'autre, & sur une même ligne, & distant de la longueur du pied entre les deux: proportion que l'on observe pour les pas en avant & en arriere.
7 Le septiéme, qui est la cinquiéme position, est d'avoir les pieds croisez l'un devant l'autre, le talon du pied de devant vis-à-vis la pointe du pied de derriere: cette position & la deuxiéme, sont en usage pour aller de côté.
Ensuite de ces positions, il faut venir à la connoissance du Pas.
Le Pas, en terme de marcher, n'est autre chose que de porter le pied d'une position à une autre, tantôt en avant, tantôt en arriere; ou de côté, le croisant devant l'autre comme à la cinquiéme; ou derriere, selon que la qualité du Pas le demande, ainsi qu'il est representé dans ces derniers quarrez: mais il suffira de donner seulement une explication du huitiéme quarré, qui est le Pas en avant, & qui servira d'intelligence pour tous les autres. C'est un Pas du pied droit en avant, qui doit se connoître de cette maniere; fçavoir, le commencement 8 du pas marqué par cette tête noire A, en forme de note; la figure du Pas s'étend en avant jusqu'à E, qui est à la fin: ce revers qui est au bout, represente le pied; l'angle du revers T, le talon; la fin du revers P, la pointe; le milieu du pas, M: ce qui signifie que lorsque le pied se leve de derriere pour se porter devant, le milieu du pas est lorsque les deux talons sont près l'un de l'autre. Ainsi ce pas étant décrit & distingué dans toutes ses parties, il doit servir d'instruction pour le reste des Pas simples, figurez dans les 9, 10, 11 & 12 quarrez.
Tous les Pas sont des traits hyerogliphes qui, dans leurs compositions, doivent exprimer par les signes qui sont marquez sur certaines distances, tous les mouvemens differens, & toutes les actions que la jambe doit faire: ainsi il est necessaire aux personnes qui seront curieuses d'écrire dans 9 ce genre, de poser ces signes régulierement aux endroits convenables; sans quoi les pas ne seroient pas representez tels que l'on doit les faire.
Je ne parlerai pas des fausses positions, parce qu'elles ne feroient qu'embroüiller; mais je dirai seulement que les bonnes sont aussi employées pour exprimer les battemens qui se font dans les entre-chats, & autres battemens en l'air, parce que l'on doit supposer, lorsqu'il se trouve plusieurs positions qui sont marquées d'un trait qui traverse la queuë, ce qui signifie que les pieds sont en l'air, & que ces changemens de position ne peuvent qu'exprimer les battemens que les deux jambes font en s'élevant, que celle qui suit qui n'est chargée d'aucun signe, elle represente où les pieds doivent être en retombant, soit sur un ou sur les deux pieds.
COmme il est dit dans le premier Chapitre, de regarder chaque planche comme representant une salle ou parquet sur lesquels les pas sont tracez: la maniere convenable pour se la bien representer, est de mettre le Livre ouvert sur le plat de la main gauche, le tenant de l’autre bien droit devant soi; de sorte que le haut de la planche, qui est le haut de la salle, soit dans sa juste situation.
Le Livre ainsi fixé, c'est de faire les pas que l'on voit décrits, lorsqu'ils ne doivent être qu'en avant ou en arriere.
Mais pour ceux qui se font en tournant, il y a une maniere très-facile que l'expérience m'a fait trouver: Par exemple, ayant à tourner un quart de 11 tout à droit, la main droite qui suit ce mouvement, fait que le côté gauche du Livre se trouve vis-à-vis le corps; de même que si l'on tourne à gauche, ce sera le côté droit du Livre qui se trouvera vis-à-vis le corps.
Quant au demi tour, la main droite le faisant faire au Livre dans le même temps, le haut de la planche qui est le haut de la salle se trouve sens-dessus-dessous, & par conséquent le Livre est à rebours.
On doit observer régulierement que le Livre soit toûjours dans sa même situation, quelque tour que l'on fasse: car autrement, l'on ne se retrouveroit plus dans la disposition convenable pour faire le pas, qui suit celui dans lequel on a tourné.
C'est pourquoi il m'a paru que rien ne pouvoit mieux contribuer à cette intelligence, que les planches suivantes, qui démontrent la maniere 12 de marcher sur differentes lignes, & de tous les côtez. Ainsi je prie le Lecteur curieux d'y faire toute l'attention possible, & de ne les point quitter qu'il n'ait compris l'utilité de ces differentes marches.
CEs démonstrations de la maniere de marcher, tant en avant qu’en arriere, & de côté, ne contribueront pas moins à l’avancement de ceux qui desirent d’apprendre cet Art, que celles des Chapitres précedens. Elles feront sentir l’utilité des lignes, par les differens chemins qu’elles prescrivent; & quel pied doit marcher, ou le droit, ou le gauche, en observant de quel côté de la ligne il est posé.
Elles feront aussi connoître que lorsque l’on a été sur un chemin en avant, & que l’on veut revenir en arriere sur la même ligne, il faut suivre une ligne ponctuée qui conduit à une autre ligne droite, où les pas sont tracez pour revenir en arriere; ce qui 18 se voit dans ces deux premiers exemples.
Le premier commence du bas de la salle vers le haut: le petit V, qui est au bout du dernier pas, signifie de poser la pointe pour repartir du même pied en arriere, en suivant la ligne ponctuée qui conduit à l’autre ligne, pour revenir sur le même chemin en arriere.
Quant au second exemple de marcher de côté, en presence, portant le pied de la seconde à la cinquiéme position, soit en les croisant par devant ou par derriere, tels qu'ils sont tracez.
Le troisiéme, est de marcher en avant en formant un rond, & revenir sur le même chemin en arriere.
Il est exprimé differemment par le cercle, qui est coupé par les lignes ponctuées; mais c’est pour disposer au huitiéme exemple, qui represente deux personnes marchant en rond.
19 Au quatriéme, c’est un homme & une femme qui montent vers le haut de la salle, & reviennent en arriere.
Le cinquiéme, represente deux personnes qui viennent obliquement, l’une du bas de la salle vers le haut, & l’autre du haut revient en bas & en croisant, reviennent par le même chemin à leur même place.
Le sixiéme, est homme & femme marchant de côté, l'un allant de la gauche à la droite & l'autre de la droite à la gauche en se croisant, & revenir à leur même place; ce que l'on appelle double-passe.
Le septiéme & le huitiéme, c’est deux personnes qui marchent ensemble en rond, en ne faisant qu'un tour; mais au huitiéme, ils en font deux.
TOutes ces marches précedentes, ne sont composées que de pas simples, qui n’ont d’autres attributs que la seule representation de porter les pieds en avant ou en arriere, & géneralement tout ce qui s’appelle marcher.
Mais en fait de danse, le caractere qui represente le pas & les positions, ou les demies, sera quelquefois chargé de plusieurs de ces signes, qui par leurs differentes formes, & la partie du pas où ils sont mis, font connoître les temperamens que l’on doit prendre pour faire des pas, soit de lever le pied, soit de plier le genoüil, ou de l’étendre en se relevant, & 21 même de sauter: en un mot, de tâcher d’exprimer distinctement tout ce que la jambe peut faire.
Par exemple, le signe de plier, A, exprimé par ce petit trait, qui est tiré en baissant vers la teste, se place au commencement, au milieu & à la fin du Pas.
Lors qu’il est au commencement, on doit plier avant que de marcher.
Au milieu, le pied qui est derriere s’approche à la premiere position, & l’on plie en continuant le Pas jusqu’à la distance porportionnée22. скорее всего опечатка, нужно: proportionnée.
Et lorsque ce signe est à la fin, le Pas se finissant, on fait le plié.
Quant au signe de relever, qui est different, en ce qu’il est droit, relevant néanmoins un peu du costé de la pointe, il se met également dans les mêmes endroits.
Le 7. le 8. & le 9e. quarrez sont chargez des signes de plier & de relever: mais l’explication qui est dans 22 chaque quarré suffit pour les faire comprendre.
Le signe de lever le pied dans les quarrez 10, 11 &12 exprimé par le trait C qui coupe le Pas, se met au commencement, au milieu, & la fin.
Celui de glisser la pointe de pied, D, ne se met qu’au milieu du Pas Et celui de la poser à terre exprimé par V, ne se place qu’au droit de la pointe du caractere qui représente le Pas. Et le signe de tomber se met au milieu.
Le signe de sauter qui est exprimé par deux crans marquez sur une demie position; quoi qu’il se place aussi sur le Pas, mais c’est selon que le Pas le demande.
Dans le second quarré, la demie position est chargée des signes de plier & de sauter, pour ainsi dire à cloche-pied.
Le 3e. est plier sur un pied & se laisser tomber sur l’autre: ce qui s’appelle un Jetté.
Le 4e. est plie & sauter sur le même pied en avanҫant.
Le 5e. est plier & sauter des deux pieds à la fois en avant, comme à pieds joints.
C’est dans cette occasion que le signe de sauter doit estre sur le Pas de même qu’au Jetté où le saut se fait en finissant le Pas.
24 Le 6e. est un demi Jetté que j’ay imaginé pour les coupez à deux mouvements & autres Pas qui sont à demi sautez.
Le 7e. est de toucher legerement à terre de la pointe du pied, en le passant devant soy, & le tenir en l’air.
Le 8e. est un Pas exrêmement lent, & qui est marqué par la teste blanche du Pas, & aussi le point qui lui donne la valeur de trois noires.
Le 9e. est un Pas lent dont la teste est blanche & par consequent vaut deux noires.
Le 10e. est le tems d’une noire poitée.
Le 11e. une noire simple.
Le 12e. un Pas vîte qui vaut une croche.
Le 13e. est un demi Pas ou Pas imparfait, qui vaut le tems d’une double croche.
Ce signe est pour démontrer l’action qu’une jambe fait, lorsque le 25 corps est opposé à l’autre.
Le signe de tourner ayant plusieurs applications, comme de tourner avant de faire le Pas, en le faisant, & à la fin du Pas. Ces trois tems m'ont engagé de le détacher du Pas & d'en inventer quelqu’autres qui fussent sensibles, pour les poser aux endroits convenables.
Ceux qui occupent les premiers quarrez de cette Planche m'ont paru differencier les uns des autres, de maniere à ne se pas tromper; ainsi l'on peut les poser facilement au dessus de la partie du Pas qui conviendra.
Par exemple, si vous devez tourner avant de faire le Pas: le signe de tourner sera devant le Pas; mais si vous devez tourner en le faisant, le 26 signe doit estre au dessus du plié. De même que si l'on ne doit tourner qu'en se relevant, le signe sera au dessus du relevé.
Quant aux differentes manieres de présenter la main, cette addition m’a paru trés-utile, en faisant connoistre de quelle maniere on doit se tenir les mains.
LOrs que l'on a compris tous ces differents signes, les plus grandes difficultez sont dissipées, parce que la connoissance des Pas s'acquiert fort aisément, en regardant avec attention les endroits où les signes sont placez.
Je commencerai par le tems de Courante au premier quarré, ce Pas se prend de la 4e. position, en partant du pied qui se trouve derriere pour le passer devant à la quatriéme position où il finit.
Mais je ne puis me dispenser de le décrire dans toutes ses parties, pour ne rien omettre de tout ce qui peut le rendre sensible.
Par exemple, cette demie position, 28 A, représente le pied qui porte le corps: elle est chargée des signes de plier & relever: parce que cette jambe contribue le plus à la forme de ce Pas, & que l'autre qui ne sait que passer de derriere qu'elle étoit devant, en glissant la pointe du pied à commencer de le glisser du milieu du Pas. Je ne dis pas qu'elle ne fasse le plié dans le même tems: & c'est par cette raison que la liaison prend des deux testes, ce qui doit servir d’avertissement pour tous les autres Pas, est que lors qu'une, liaison est à la teste de la demie position & qu'elle se communique à la tête du Pas, la jambe qui marche participe aux mouvemens qui sont attribuez sur la jambe qui porte le corps.
La teste du Pas est blanche, pour faire marquer qu'il est lent, parce qu'il occupe dans son étenduë les tems d'une mesure à trois ou à deux tems.
Celui qui se commence de la premiere ou troisiéme position, le plié 31 en doit estre plus près de la teste.
On trouve dans chaque quarrez le Pas écrit des deux pieds. C'est pourquoy lors que l'on fait un Pas d'un pied, il faut le faire de l'autre, ce qui donnera beaucoup d'intelligence .
LE Demi-Coupé n’étant que la partie d’un Pas composé; comme du Coupé, du Pas de Bourée, & autres; on le nomme demi. Il n’est diversifié que suivant la position par laquelle il se commence, ce qui se voit par cette Table.
Au premier quarré le Pas commence de la 4e. position; c’est pourquoi le signe de lever le pied est au dessus de la teste des Pas pour donner à connoistre que le pied qui est derriere, se leve afin de s’approcher à la premiere position, qui est le milieu du Pas, & dans cette partie, on pose le plié, & le relevé est à la fin: ce qui démontre clairement, qu’ayant plié, on passe le pied devant à la distance proportionnée où l’on se releve, ce qui termine l’étenduë du Pas.
33 Il n’en est pas même du second quarré: le Pas se commence de la 3e. position; ainsi le plié est au dessus de la teste, & le pied se leve ensuite pour conduire devant, jusqu’à sa distance proportionnée, où le relevé est à la fin à l’ordinaire.
Au troisiéme quarré, il se commence à la 2e. position: c’est par cette raison que le signe de lever le pied est le premier & les autres à l’ordinaire.
Au quatriéme il commence de la premiere position, & le pied est au dessus de la teste par la raison que je viens de dire, qui est qu’un mouve-plié se fait à la premiere position.
Au cinquiéme, qui est un demi-balancé, le Pas est plié d’abord, & se porte à costé en se relevant.
Au sixiéme, il est croît pardevant jusqu’à la 5e. position, parce que le Pas traverse la ligne droite.
Au septiéme, il est battu derriere, 34 en pliant & reporté devant.
Au huitiéme, il est battu devant sur le cou du pied en pliant & reporté en avant pour se relever.
Quant aux Pas qui se font en tournant, il suffit d’observer le signe de tourner qui accompagne le Pas, qui démonstre clairement s’il est tourné un quart, ou un demi-tour.
De plus, ceux qui seront curieux de décrire cer Art régulierement, observeront que la pointe du pied doit estre tourné de même que le Pas doit estre fait.
ON ne compte que deux Coupez.
Le Coupé ordinaire.
Et le Coupé à deux mouvemens.
Le premiere est composé d’un demi-Coupé & d’un Pas lent.
Le second d’un demi-Coupé & d’un demi-Jetté.
Le Coupé ordinaire est quelquefois augmenté de battemens. Mais comme cette varieté de Pas ne se trouve gueres dans les Danses de Ville, je me restraindrai à un certain nombre capable de donner toute l’intelligence necessaire.
Ce que l’on pourra voir dans les Tables suivantes de cette premiere Partie. J’ay même observé un arrangement dans ces differentes Tables, 40 en mettant les Pas en avant les premiers, ensuite ceux en arriere, ainsi des autres.
ON distingue deux Pas de Bourée; sҫavoir le Pas de Bourée à deux mouvemens, qui est l’ancien, & il est composé d’un demi-Coupé, d’un demi-Jetté qui fait le troisiéme Pas: c’est celui qui est dans le premier quarré de la premiere Table des Pas de Bourée.
Mais comme l’on a adouci l’usage de ces mouvemens qui estoient trop frequens, on pratique beaucoup le second que l’on nomme Pas de Bourée en Fleuret, & il est composé d’un demi-Coupé & de deux Pas marchez sur la pointe de pied.
Le Fleuret est encore une espece de Pas de Bourée, parce qu’il est composé 50 de trois Pas. Il se fait de deux manieres, dont la premiere n’a qu’un mouvement, & la seconde est de sauter au troisiéme Pas.
Il s’en fait encore d’une autre espece; c’est qu’au 1r. Pas on fait un demi-Jetté au lieu du demi-Coupé. Ce Pas est fort agreable dans des Airs à deux temps, gais comme les Rigaudons, & autres Airs vifs.
Il y a encore un autre Pas qui est à la fin des Tables; que l’on appelle Pas de Bourée doublé ou Pas de Bourée vîte; & il est composé de quatre Pas, sҫavoir le premier un demi-Coupé & deux Pas marchez sur la pointe des pieds, & le quatriéme un demi-Jetté; ce qui finit les quatre Pas, dont il est composé.
Mais comme je suppose que ceux qui feront usage de Livre, sҫavent danser, une plus longue explication deviendroit autant ennuieuse qu’inutile; de plus il y a dans chaque quarré, 51 à la reserve neanmoins, où je n’en ai pas mis, afin d’engager à les deviner de soy-même, & par-là aquerir une plus parfaite connoissance.
CE Pas est proprement un tems qui se fait sur les deux pieds, ou sur un. J’en remarque trois differens: sҫavoir, pirouetter sur un pied, tandis que l’autre jambe circule: pirouetter sur les deux pieds, & pirouetter sauter.
Toutes ces trois manieres se distinguent fort aisément dans la Table de ces Pas. Je ne parlerai point de celle de les faire, non plus que des autres Pas: d’autant que ce ne seroit que la répétition de ce que j’en ai déja traité dans mon Livre du Mâitre à Danser: je dirai seulement que ce genre de Pas m’a déterminé de détacher le signe de tourner, parce que ce n’est qu’en se relevant que l’on doit tourner: ainsi pour representer 55 le Pas tel qu’il doit être, le signe de tourner est au-dessus du relevé, & non au commencement du caractere qui represente le Pas.
JE ne donnerai aucune explication sur le Pas de Menuet; mais je décris seulement les differentes manieres dont il se fait.
Le plus en usage est le Pas à deux mouvemens: on les trouve tous representez dans la Table des Pas de Menuet, & aussi une partie des Pas qui sont usitez dans les Menuets figurez ou Passepied, comme les contre-tems, Pas graves, & autres qui se mêlent quelquefois dans le Menuet ordinaire: ce qui fait un fort bon effet, & y donne la grace & l’enjouëment, sur tout lorsqu’on sҫait les placer à propos.
LE Pas Assemblé est un pas plié sur un pied, tandis que l’autre se rapproche en se relevant: si c’est en avant, ce doit être celui de derriere qui vient s’approcher à la premiere position: si c’est en arriere, celui de devant se raproche.
Il se pratique de deux manieres; la premiere, en pliant & en se relevant lorsque les deux pieds sont près l’un de l’autre.
Et la deuxieme en sautant: mais la Table de ces Pas est plus demonstrative que toute l’explication que l’on en pourroit donner: il s’écrit sur toutes les lignes.
J’ai mis à la suite les Pas de Gaillarde, comme étant composez d’un 60 Assemblé, d’un Pas tombé, & d’un Demy-Jetté.
Le Pas de Rigaudon est un Pas qui se fait en place; & comme il faut être à la premiere position pour le faire, & par consequent tenant de l’Assemblé, c’est ce qui m’a obligé de le placer à la fin de cette Table.
CE Pas est très-varié par les differentes manieres de le faire; aussi le doit-il être dans celle de le décrire: c’est pourquoi j’ai tâché de le rendre d’un intelligence claire, distincte & sensible; de sorte que l’on ne pourra s’y méprendre en prenant un Pas l’un pour l’autre: mais comme j’ai fait un changement qui demande une explication particuliere, je commencerai par le premier quarré de la Table de ces Pas.
Ce Pas partant de la quatrieme position, c’est une demie position qui est chargée des signes de plier & de sauter: mais la liaison qui sort de la tête de la demie position, & qui communique à la tête du Pas, est pour 64 faire connoître que quoique les mouvemens soient pris sur la jambe qui porte le corps, celle qui est derriere ne laisse pas d’y participer: ainsi ce Pas est plier sur les deux pieds, & sauter sur celui qui est devant; & celui qui est derriere se rapproche en restant en l’air derriere, tel qu’il est démontré par cet exemple.
Le second quarré est de plier & sauter sur un pied, tandis que l’autre est en l’air; ce qui s’appelle sauter à cloche-pied.
Au troisiéme, c’est de plier & sauter sur un pied, tandis que l’autre se passe devant.
Le quatrieme est plier & sauter en avanҫant devant, ce qui doit être entendu qu’à la place de la demie position, c’est ce demi Pas qui fait connoître que l’on prend son mouvement à une place pour sauter plus loin en avant: & c’est la difference qu’il y a de sauter en place, ou de sauter en avanҫant.
74 Le cinquieme est plier & sauter des deux pieds à la fois en avanҫant.
Le sixiéme est le contre-tems dans son entier, parce qu’il est composé d’un sauté sur un pied, tandis que l’autre marche, & d’un autre Pas en avant: c’est par cette raison qui paroît convaincante que cette demie position ou demi Pas sont necessaire pour representer le Pas tel que l’on doit le faire.
Je croi cette explication suffisante à tous les Pas de cette espece, parce que pour aquerir cet usage, il faut connoître le Pas avant que d’entreprendre de le faire: ce que je croi avoir conduit si clairement qu’en trèspeu de tems on comprendra cette méthode avec facilité.
QUoique ce Pas soit connu de tous ceux qui sҫavent danser, le changement que j’y fais pour l’exprimer au vrai, m’engage de donner une explication sur la forme de ce Pas, afin de faire connoître la conformité de ce genre d’écrire à la maniere dont on fait le Pas.
On plie sur une jambe, tandis que l’autre s'ouvre à côté & se rapproche en se relevant pour sauter; & l'on retombe plié sur les deux pieds, & croisé à la troisiéme position; & du même tems on se releve sur un. C'est ce qui me paroît être démontré assez clairement par cette demie position du pied qui est devant: elle est chargée des signes de plier & de sauter.
La liaison qui sort de la demie po76 sition, & va jusqu'à la tête du caractere qui demontre ce que l'autre jambe fait; est pour faire comprendre que lorsque l'on plie la jambe qui est derriere s’étend à côté en formant un demi cercle, & en l'achevant on retombe sur les deux pieds; ce qui est annoncé par ces deux crans qui sont à la fin du demi cercle, & comme on doit tomber, plier. C'est pour cette raison que le plié est au-dessus des deux queuës.
Il est à remarquer que lorsqu'il est dessous, c'est le premier mouvement; & lorsqu'il est en dessus, c'est une marque que l'on doit être plié en finissant le Pas; & de-là étant plié, les positions qui sont au-dessus, l'une est chargée du signe de sauter, & l'autre de rester le pied levé; soit celui de devant ou celui de derriere que l'on se releve; comme on le peut voir dans les differens exemples de ces Pas.
Mais il se trouve un autre pas de 77 Sissonne dans l'Aimable Vainqueur, qui se fait differemment, parce qu'au premier tems on retombe les genoux tendus; & au second on plie & l'on saute, tel qu'il est écrit dans cette danse, que j’ai écrit suivant le sentiment de l'Auteur.
CE Pas se fait également d'un pied comme de l'autre, ainsi c'est un pas simple qui fait partie d'un Pas composé; parce qu'un seul ne peut remplir une mesure, il en faut deux.
Il fait partie de plusieurs autres Pas, comme du coupé à deux mouvemens du Pas tombé, du contretems ballonné & autre Pas.
Le premier mouvement de ce Pas; se commence de la jambe de devant. Le corps étant posé dessus, on plie; & la jambe qui est derriere, s'approche, & en se passant devant, le genouil de la jambe qui étoit devant, fait son extension qui par son mouvement rejette le corps sur le pied qui s'est passé devant; c'est pourquoi le signe de sauter est à la fin du Pas.
Cette explication suffit pour tous les Pas de cette espece.
IL y a plusieurs manieres de Chassez differentes les unes des autres, que j'ai tâché de décrire si distinctement, que pour le peu que l'on examine où les mouvemens sont placez sur les caracteres qui representent les Pas, on les fera chacun selon leur espece sans se méprendre.
Je ne donne pas d'explication sur la maniere de former ce pas; ce Traité n’étant que pour celle de l'écrire, en le démontrant tel qu'il doit être fait, outre que ce ne seroit qu’une repetition de ce qui est dit dans mon premier Livre du Maître à Danser, qui explique la maniere de former la plus grande partie des Pas.
LA Saillie est un Pas singulier dans son espece, & qui demande un caractere qui l'exprime clairement, ce que j'ai tâché d'observer.
Etant élevé sur les deux pointes des pieds à la premiere position, ils s'échapent tous deux à la fois, ou de côté, ou l'un devant & l'autre derriere, se trouvant à la distance proportionnée qui est la quatriéme position.
Cette marque d'Echapé est exprimée par ces deux crancs qui sont barrez; ce qui tient du sauté & du tombé, qui est le vrai sens que l'on doit donner pour faire ce Pas avec grace.
Au premier quarré, il est à demi, parce que pour le faire dans toute son étenduë, il doit être doublé & assemblé au troisieme Pas, ce qui le termine.
L’Intention de plusieurs habiles Maîtres à Danser, qui ont travaillé à la Chorégraphie, étoit sans doute de laisser à la Posterité des marques de reconnoissance de la réputation qu'ils avoient par les soins qu'ils s’étoient donnez à faire revivre un Art que la longueur des tems avoit détruit. C'est donc à eux que nous sommes redevables de la maniere de pouvoir tracer les Danses sur le papier: ainsi pour en faire tout l'usage qu'elle merite & qu'elle demande, j'ai entrepris, sans m'écarter de leur route, de lui donner une intelligence si facile, qu'elle pourra être pratiquée de tout le monde. C'est à cette occasion que je mets ce parallele qui fera connoître la difference des Pas de Danse de 94 l’ancienne Chorégraphie d'avec cette nouvelle que je me suis proposé.
Le premier quarré est un tems de courante du pied droit, le corps étant posé sur le pied gauche, où les deux actions principales se prennent, qui sont le plié & le relevé, tandis que le pied droit quitte terre pour se rapprocher de l'autre, & se passer devant en glissant la pointe, quoique la jambe droite ne laisse pas de participer aux mouvemens pliez & relevez qui se font de la jambe gauche: & c'est ce que l'on doit enten-dre par la liaison qui se communique aux deux têtes; elles sont blanches; afin de faire connoître que ce pas est lent, & que l'on peut en faire le même usage que des blanches dans la Musique, ainsi que je l’ai dit précedemment dans la valeur des Pas.
Au second quarré on tourne un 95 quart de tour: & c'est pour cette raison que comme on tourne en se relevant, j'ai détaché les signes de tourner du caractere du Pas pour les placer aux endroits convenables.
Quant au 3. qui est un demicoupé en avant, il n'y a que la barre qui est au-dessus de la tête du Pas, qui doit faire connoître que le pied se leve de la quatrieme position où il étoit derriere pour se rapprocher les deux talons près l'un de l'autre, & là plier pour le passer devant, & se relever dessus. Le signe de lever le pied, que est, comme je viens de dire, au-dessus de la tête du Pas, est très-necessaire pour faire entendre que le plié se doit passer sur la jambe de derriere, & que le relevé qui est à la fin du Pas, est placé où il doit être.
Quant au 4. quarré, c'est le même pas commencé de la premiere position: c'est pourquoi le signe du plié est devant celui de lever 96 le pied. Distinction qui m'a paru juste; c'est pourquoi lorsque l'on écrit un Pas, il est très-essentiel de poser les signes aux endroits convenables, afin d'éviter les fautes que l'on pourroit faire dans l’execution du Pas.
Le 5. quarré n’est different que par le signe de lever le pied.
Le 6. est un Coupé qui n'a que la même observation que j’ai faite pour les demi-coupez.
Le 7. & 8. à examiner l'un & l'autre, l'on s'appercevra facilement lequel Pas est le plus vrai soit de l'ancienne, ou de la nouvelle.
Le 9. est une glissade, où il m'a paru que les deux crancs tranchez par-dessus, étoient un signe convenable pour exprimer la maniere de faire ce Pas, parce qu'il tient du Sauté, & même du Pas tombé; c'est pourquoi je regarde cela comme un demisauté.
Au 10. c'est un coupé assemblé 97 & élevé sur la pointe: autre signe qui m'a paru très-essentiel de le distinguer & le faire ressentir, parce que le signe de relever ou d'élever est tout different, d'autant plus qu'il faut être plié pour se relever: mais pour s'élever, ce n'est qu'une extension du coude-pied qui oblige de lever les talons, & par consequent vous éleve sur la pointe des pieds.
Au 12. & 13. on retranche les dernieres positions pour éviter la confusion; parce que lorsqu'un Pas plié en deux traverse ou anticipe sur la ligne, il est à présupposer qu'il doit battre devant ou derriere, selon qu'il est conduit. Si la tête du Pas va en remontant & traverse la ligne, on doit entendre qu'il bat derriere; au lieu que le Pas venant du haut en bas, on doit suposer qu'il bar sur le cou-de pied.
Le 14. est different: il faut absolument une demie position pour faire 98 connoître que la jambe se porte sur le cou-de-pied en pliant, & se conduit en se relevant; mais la jambe qui fait le second Pas ne fait que se raprocher de l'autre pour se reporter à côté; & comme le battement n'est pas croisé, il ne fait que s'approcher de la ligne.
Quant aux Pas de Bourrée qui occupent le 15. & le 16. l'un est le vrai, qui a un mouvement du cou-de-pied au dernier Pas, & l'autre est celui que l'on nomme Fleuret.
Le 17. est un Jetté qui ne differe de l'ancien que par la barre qui est audessus de la tête, & qui signifie que le pied est en l'air, avant de plier pour se jetter en avant dessus.
Pour le Pas assemblé contenu dans le 18. quarré, il m'a paru plus conforme dans son vrai, puisque l'on plie sur une jambe, tandis que l’autre qui est en l'air, s'ouvre à côté, & se raproche à la premiere position, lorsque 99 la gauche fait son extension pour sauter.
C'est pour cette raison que la demie position du pied gauche est chargée du signe de plier & de sauter, & que le caractere du pied droit le signe de sauter est à la fin du Pas: outre que la liaison se communique aux deux têtes, afin de faire connoître que quoique la principale action du Pas se fasse sur le pied gauche, le droit participe & agit de concert l'un avec l'autre: celui en arriere est la même modulation.
Le 20. on tourne un tour entier, & ce n'est que le saut qui fait tourner: c'est pourquoi le signe de tourné est posé au-dessus de celui de sauter, afin de se conformer à la vraie maniere de faire le Pas.
Au 21 c’est le contre-tems qui m'a paru si vrai, que l'on ne peut se méprendre, puisque l'on plie & saute sur le pied gauche, tandis que la jambe 100 droite fait un pas en avant.
Le 22. est le même Pas en arriere; ce qui est la même regle pour tous les Pas, où les deux actions de plier & de relever ou de sauter, se font avec plus d'apparence sur une jambe que sur l'autre: ainsi on n'a que faire de supposer, lorsque l’on peut representer le vrai. C'est ce qui m’a forcé de mettre le même Pas deux fois du même pied dans chaque quarré en deux manieres, afin que l’on connoisse d’un coup d’œil l’augmentation & la correction.
Je passe du 22. au 29. parce que les Pas se trouvent si conformes à la maniere qu’ils doivent être faits, que l’on ne peut s’y méprendre.
Dans le 29. c'est le contre-tems de côté. Ce Pas étant commencé de la seconde position, on plie les deux pieds à terre, & l’on saute sur le pied gauche, tandis que le pied droit se passe devant, & l’on fait un autre Pas 101 du pied gauche à côté: ce qui fait l’étenduë de ce Pas, telle que je l'ai tracée.
Au 31. quarré, c'est le Pas de Rigaudon, qui se commence de la premiere position, en pliant les deux pieds, à terre, & en sautant sur la jambe, gauche, tandis que la droite s'ouvre un peu à côté en s'arondissant, & se remet du même tems à la premiere position.
La jambe gauche fait ensuite la même action, sans plier ni sauter, & telle que je l'ai tracée. J'en ai mis plusieurs de suite de differens Auteurs, afin que l'on puisse y distinguer le vrai d'avec le faux.
Quant aux autres Pas qui suivent, comme je les ai décrit, tels que l’on doit les faire, je cesse de les expliquer. J'espere que pour le peu que l'on ait quelque teinture de la Danse, on les trouvera facilement; il y en a même plusieurs qui sont seuls, parce que je ne les ai pas trouvé écrits dans 102 l'ancienne Table, & j'ai cru faire plaisir au Public de les placer dans cet endroit.
Quoique cette Methode soit trèsfacile, on ne doit pas croire qu'elle fera former les Pas avec grace sans le secours d'un Maître: ce n'est que par ses bons soins & l'inclination que l'on a, qu'on parvient à cette belle execution.
Mais je suppose qu'une personne sçache bien danser, on apprendra de soi-même avec ce Traité, des Pas où des Danses que l'on n'aura pas sçûës, & l'on n'oublira pas celles que l'on aura appris.
APrès avoir donné la clef de chacun en particulier des principaux Pas qui sont en usage dans les Danses de Ville, il m'a paru necessaire de placer ici ce Traité de la Cadence, afin que l'on puisse connoître certainement comme un Pas doit être placé dans l'air que l'on jouë.
Je ne me sers pas de l'idée que le premier Auteur en a donnée, où il prétend que tout Pas peut entrer dans differentes mesures, étant une chose que tous ceux qui font usage de la Danse sçavent; mais il consiste dans la maniere de le faire, soit plus lent, 108 soit plus vîte: ce qui occupe ces differentes mesures en donnant aux Pas une juste conformité à l'air.
Et comme je n'ai trouvé dans aucun de ces Traitez cette vraie & sensible demonstration, quoique bonne dans sa maniere; c'est ce qui m'a engagé de faire celui-ci avec le plus d'exactitude qu'il m'a été possible, pour que l'on puisse ressentir distinctement comme toutes les parties d'un Pas se passent par rapport aux notes: ce que l'on peut voir par ce premier exemple.
J'entends par rapport à la note qui devanee la mesure, qu'elle doit être employée pour lever le pied, plier, & passer le pied devant, en se relevant à la deuxiéme note 2, qui frape la mesure, & rester sur la pointe du pied droit l'espace du tems de la noire; mais comme elle est pointée, on pose le talon dans la valeur du point 3, & le 4: c'est pour lever le pied & l'approcher 109 de l'autre. Le 5. est pour plier & passer le pied jusqu'à la distance proportionnée du Pas, afin de se relever sur le pied gauche à la note 5, pour ensuite passer les deux Pas suivans vîte sur la pointe des pieds dans l'étenduë des noires 6 & 7: mais à la derniere le talon se pose, & l'on plie en même tems pour être à portée de se relever à la mesure suivante.
Voila ce qui m'a paru le plus vrai pour representer le Pas de Menuet juste dans toutes ses parties.
Dans le second exemple, la premiere note 1 est poser au relever: c'est ce qui fait voir clairement que le plier & passer le pied doit être fait avant que la mesure commence, afin d'être prêt à se relever lorsque la mesure frape.
Quant aux autres Pas qui se font dans le Menuet, j'ai suivi la même route que je viens de décrire, & qui m'a paru la plus vraie.
110 Ce que l'on peut examiner dans les exemples qui suivent, en voyant les chiffres qui sont dessous les Notes, dont les pareils chiffres sont placez au droit des actions du Pas, ainsi on peut; non seulement au Pas de Menuet, mais à tous les differens Pas de Danse, voir où toutes les parties d'un Pas se passent dans la Musique.
Je me suis servi pour exemple de plusieurs passages des Danses de Mr Pecourt, comme étant connuës, & de plus placées dans toute la précision de l'air. J'ai même prié cet excellent Auteur de les voir avant que de les écrire, & il les a trouvé conformes à ses intentions, de même que les Danses contenuës dans cette seconde Partie. J'ai même choisi celles qui ont eu le plus de cours, & je finis par la Roïale qui a été composée pour feu Madame la Dauphine: mais il seroit inutile de parler de leurs beautez, la memoire que le Public en conserve étant au-111 dessus de tout ce que l'on en pourroit dire.
Quant aux autres Danses de Mr Pecour, je les ai toutes écrites à la main, suivant la correction; & pour la commodité du Public. Elles se vendront séparément, de même que les Danses nouvelles que je donnerai tous les ans avant la saint Martin, soit en Recueil ou séparément: elles se vendront 12. sols, & un Recueil de Menuets nouveaux avec les Basses qui sera du même prix.
Je donnerai incessamment avis du Traité general de la Chorégraphie, contenant un nombre infini de tous les Pas qui sont en usage dans la Danse sérieuse; & de plus des caracteres nouveaux que j'ai inventez pour exprimer les Pas de tous les caracteres comiques. Il sera orné de plusieurs Taille-douces, qui representeront les diverses attitudes où l’on doit être.
FIN.
Contenus dans ce Livre.
CHAP. I. DEs premiers principes de, la Choregraphie. page 1
CHAP. II. Des Positions, & du Pas simple. 5
CHAP. III. De la maniere de tenir le Livre. 10
CHAP. IV. Des differentes Marches. 17
CHAP. V. Des Signes differens qui expriment les mouvemens & autres actions necessaires à la Danse. 20
Suite de differens Signes. 23
Des Signes de tourner & des differentes manieres de presenter les mains. 25
CHAP. VI. Du tems de Courante ou Pas grave. 27
Page CHAP. VII. Des Demi-Coupez. 32
CHAP. VIII. Des Coupez. 39
CHAP. IX. Des Pas de Bourée & des Fleurets. 49
CHAP. X. Des Pirouettez. 52
CHAP. XI. Des Pas de Menuet, & autres Pas qui sont en usage dans les Menuets figurez & Passepied. 56
CHAP. XII. Des Assemblez, Pas de Gaillarde, & de Rigadon. 59
CHAP. XIII. Des Contre-tems de toutes especes. 63
CHAP. XIV. Des Pas de Sissonne. 75
CHAP. XV. Des Jettez. 80
CHAP. XVI. Des Chassez. 81
CHAP. XVII. Des Saillies, ou Pas échapez. 84
Discours parallele de l'ancienne Chorégraphie avec la nouvelle. 85
Traité de la Cadence. 103
Douze des plus belles Danses de Monsieur Pecour Compositeur de Ballets de l’Academie Royalle de Musique
Etremis en Choregraphie Suivant la Nouvelle Correction et augmentation du S.r RAMEAU M.tre Danser Ordinaire de la Maison de la Reine seconde douair riere d’Espagne Seul Privilegié du Roy pour l’Art décrire toutes Sortes de Danses